Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2011-862 du 22 juillet 2011 relative à l'organisation de l'épidémiosurveillance, de la prévention et de la lutte contre les maladies animales et végétales et aux conditions de délégation de certaines tâches liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires

NOR : AGRG1115136P
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/rapport/2011/7/23/AGRG1115136P/jo/texte
JORF n°0169 du 23 juillet 2011
Texte n° 27

Version initiale



  • Monsieur le Président de la République,
    Le I de l'article 11 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance, avant le 27 juillet 2011, les dispositions législatives nécessaires afin de :
    « 5° Définir et catégoriser les dangers sanitaires, déterminer les conditions dans lesquelles des organismes à vocation sanitaire peuvent s'organiser, au sein de structures pouvant s'inspirer du statut d'association syndicale de détenteurs de végétaux ou d'animaux, pour concourir aux actions de surveillance, de prévention et de lutte, étendre le champ d'application de l'article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime à la lutte contre les maladies animales et les organismes nuisibles aux végétaux, définir une organisation de l'épidémiosurveillance animale et végétale, déterminer les modalités de financement des actions menées contre ces dangers, procéder aux modifications du même code nécessaires à son adaptation à ce dispositif et prendre toutes les mesures de simplification qui pourraient en découler ;
    « 6° Définir les conditions dans lesquelles certaines tâches particulières liées aux contrôles sanitaires et phytosanitaires prévues aux titres Ier, II et V du livre II du même code peuvent être déléguées à des tiers ;
    « 7° Procéder aux modifications de numérotation et à la rectification des intitulés au sein du livre II du même code, rendues nécessaires en application des dispositions prises en vertu du présent article. »
    Ces dispositions traduisent les conclusions des Etats généraux du sanitaire (EGS) qui se sont tenus de janvier à avril 2010 au ministère chargé de l'agriculture.
    Les EGS ont montré que la France dispose d'une organisation sanitaire performante, qui a permis de lutter efficacement contre les grandes maladies animales et végétales, mais qu'il convient toutefois de l'adapter aux nouveaux enjeux (mondialisation croissante des échanges, changements climatiques, modifications des écosystèmes...).
    Ainsi, il a été proposé de revoir les dispositions du code rural et de la pêche maritime afin de clarifier les responsabilités de l'Etat et des professionnels dans la prévention, la surveillance et la lutte contre les dangers sanitaires liés aux animaux et aux végétaux.
    Les nouvelles dispositions permettent de renforcer l'efficacité de la gouvernance, de coordonner et mutualiser les actions de prévention et de surveillance, de développer les partenariats en clarifiant les missions, les compétences et les responsabilités des différents acteurs, dans le but d'améliorer la performance des systèmes de gestion des santés animale et végétale au service de la santé publique et de la compétitivité de l'agriculture française.
    C'est dans cet objectif que l'ordonnance propose de classer les différents types de dangers sanitaires en trois catégories déterminées selon la gravité du risque qu'ils présentent, et la plus ou moins grande nécessité, de ce fait, d'une intervention de l'Etat ou d'une action collective contre ces dangers.
    Les modalités selon lesquelles sont déterminées et prises en charge les mesures de surveillance, de prévention ou de lutte diffèrent en fonction des catégories de dangers sanitaires ainsi définies.
    L'Etat doit assurer une coordination de l'ensemble des actions en mobilisant toutes les compétences disponibles. Une instance de concertation nationale, le conseil d'orientation de la politique sanitaire agricole, sera créée à cet effet par décret. Ce conseil se substituera au comité consultatif de la santé et de la protection animale et au comité consultatif de la protection des végétaux.
    L'Etat doit également pouvoir s'appuyer sur des organismes compétents dans le domaine sanitaire. Parallèlement, les organisations professionnelles doivent pouvoir disposer des outils nécessaires pour conduire les stratégies sanitaires concernant les dangers à l'encontre desquels des actions collectives sont nécessaires. C'est dans ce double objectif que l'ordonnance prévoit de reconnaître et de confier des missions de surveillance et de prévention, pouvant être étendues à la lutte, à des organismes à vocation sanitaire ou à des organisations vétérinaires à vocation technique ainsi qu'à des associations sanitaires régionales regroupant ces organismes, ainsi que les modalités selon lesquelles certaines missions spécifiques peuvent leur être déléguées.
    L'ordonnance rassemble dans un chapitre du titre préliminaire du livre II du code rural et de la pêche maritime, relatif à la santé publique vétérinaire et phytosanitaire, les nouvelles dispositions relatives à l'épidémiosurveillance, la prévention et la lutte contre les dangers sanitaires dans les domaines de la santé animale et végétale.
    L'article 1er de l'ordonnance étend le champ du chapitre Ier du titre préliminaire du livre II du code rural et de la pêche maritime, relatif à l'épidémiosurveillance dans les domaines animal et végétal, à des dispositions générales relatives aux modalités de surveillance, de prévention et de lutte contre les dangers sanitaires.
    La première section regroupe des définitions de notions communes à l'ensemble du livre II.
    L'article L. 201-1 définit les différentes catégories de dangers sanitaires. Ceux-ci comprennent les maladies des animaux et les organismes nuisibles aux végétaux mais également les dangers de nature à porter atteinte à la sécurité sanitaire des aliments ainsi que les maladies d'origine animale ou végétale qui sont transmissibles à l'homme.
    Trois catégories de dangers sont ainsi définies :
    1° Les dangers sanitaires dits « de première catégorie » : il s'agit de dangers susceptibles de porter une atteinte grave à la santé publique ou à la santé des végétaux et des animaux à l'état sauvage ou domestique, ou de perturber gravement, par leurs effets directs ou indirects, l'économie d'une filière animale ou végétale, et qui requièrent dans l'intérêt général que des mesures de prévention, de surveillance et de lutte soient rendues obligatoires par l'autorité administrative.
    Devraient ainsi notamment figurer dans cette liste :
    ― la tuberculose, la brucellose, la rage, exemples de maladies graves en raison de leurs effets possibles sur l'homme et les animaux ;
    ― la fièvre aphteuse, exemple de maladie ayant un impact sur l'économie de plusieurs filières, y compris en matière de commerce extérieur ;
    ― le nématode du pin, le charançon rouge du palmier, exemples de dangers avec un impact sur les végétaux très important pour le secteur forestier ou pour le secteur ornemental et touristique ;
    ― la chrysomèle du maïs, exemple de danger ayant un impact économique fort sur une filière ;
    ― le cynipse du châtaignier, organisme nuisible qui pourrait mettre gravement en péril les filières de production dans certaines régions dont l'économie rurale est très liée au châtaignier ;
    2° Les dangers sanitaires dits « de deuxième catégorie » sont des dangers de moindre gravité que ceux de première catégorie pour lesquels il peut être nécessaire, dans l'intérêt collectif, de mettre en œuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte. Ces mesures peuvent être soit édictées par l'autorité administrative, soit mises en œuvre à l'initiative des acteurs concernés selon un programme collectif volontaire ;
    3° Les dangers qui ne relèvent ni de la première ni de la deuxième catégorie et pour lesquels la mise en œuvre de mesures de prévention, de surveillance ou de lutte relèvent de l'initiative privée.
    La liste des dangers des première et deuxième catégories sera établie dans des conditions définies par voir réglementaire. Parmi les conditions ainsi définies figureront la réalisation d'une évaluation scientifique du risque conduite par l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), une analyse des impacts socio-économiques ou simplement économiques et la consultation du futur comité national d'orientation de la politique sanitaire agricole. Une procédure d'urgence sera définie dans ce décret pour le cas particulier des pathogènes émergents, intégrés par défaut dans les dangers sanitaires de première catégorie, afin de pouvoir définir des mesures rapidement. Les listes des maladies et organismes nuisibles feront l'objet de deux arrêtés ministériels distincts pour le secteur animal et le secteur végétal.
    L'article L. 201-2 donne une définition des notions de « propriétaires et détenteurs » d'animaux ou de végétaux afin de faciliter la lecture de l'ensemble du livre II du code rural et de la pêche maritime, de nombreuses dispositions de ce livre renvoyant à ces notions.
    La deuxième section, qui comprend les articles L. 201-3 à L. 201-6, précise les responsabilités de l'Etat dans la surveillance, la prévention et la lutte contre les dangers sanitaires.
    L'article L. 201-3 reprend certaines dispositions de l'actuel article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime permettant d'adopter toute mesure pour la collecte, le traitement et la diffusion des données épidémiologiques et précise les conditions dans lesquelles la collecte, le traitement et la diffusion des données s'effectuent.
    L'article L. 201-4 prévoit les mesures générales adaptées à la prévention, la surveillance et la lutte contre les dangers sanitaires de première et deuxième catégorie que peut prendre l'autorité administrative.
    L'article L. 201-5 prévoit l'établissement par l'autorité administrative, pour certains dangers sanitaires de première catégorie, d'un plan national d'intervention sanitaire d'urgence définissant des principes d'organisation et les moyens à mobiliser pour faire face à ces dangers, mis en œuvre et adapté par les préfets dans le cadre du dispositif d'organisation de la réponse de sécurité civile (Orsec). Il confère au préfet les pouvoirs figurant à l'actuel article L. 223-3.
    L'article L. 201-6 précise les agents compétents pour procéder à l'inspection et au contrôle du respect des obligations réglementaires édictées en application des dispositions du titre préliminaire du livre II.
    La troisième section, qui comprend les articles L. 201-7 à L. 201-13, précise la responsabilité des personnes autres que l'Etat dans la surveillance, la prévention et la lutte contre les dangers sanitaires.
    L'article L. 201-7 reprend plusieurs dispositions existantes soumettant divers acteurs privés à des obligations de déclaration à l'autorité administrative en cas de détection ou suspicion d'apparition d'un danger sanitaire sur le territoire national.
    Ces obligations et les acteurs diffèrent en fonction des catégories de dangers, et sont plus étendues s'agissant des dangers sanitaires de première catégorie ou de certains dangers de deuxième catégorie figurant sur une liste établie par l'autorité administrative. Cette déclaration est faite auprès des services de l'Etat ou à l'association sanitaire régionale, lorsqu'elle existe, dans les cas définis par l'autorité administrative.
    L'article L. 201-8 pose le principe que les mesures de prévention, de surveillance et de lutte sont à la charge des détenteurs, y compris le coût du suivi des programmes sanitaires qui s'appliquent à leur production, sans que ce principe ne s'oppose à l'attribution d'aides publiques.
    La logique retenue au cours des EGS prévoit une implication décroissante de l'Etat de la première à la deuxième catégorie de dangers sanitaires.
    L'article L. 201-9 définit les organismes à vocation sanitaire et les organisations vétérinaires à vocation technique ainsi que les conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut leur confier, par voie de convention, des missions de surveillance et de prévention qui peuvent être étendues à la lutte contre les dangers sanitaires. Il précise que ces mêmes missions peuvent être confiées aux associations sanitaires régionales.
    L'article L. 201-10 reprend en les adaptant certaines dispositions des I et II de l'ancien article L. 201-1. Il prévoit la constitution par l'autorité administrative, sous son autorité, de réseaux de surveillance et de prévention des dangers sanitaires, dont elle définit l'organisation, ainsi que l'obligation pour un ensemble d'acteurs d'adhérer au réseau correspondant à leur type et à leur zone d'activité et de participer aux actions de prévention, de surveillance et de lutte dont ils sont responsables, directement ou par l'intermédiaire d'organismes à vocation sanitaire.
    L'article L. 201-11 prévoit la possibilité pour l'administration de reconnaître comme association sanitaire régionale une fédération régionale d'organismes à vocation sanitaire.
    Cette disposition a pour objectif de favoriser le regroupement des différents organismes à vocation sanitaire reconnus. Ces associations sanitaires ont également vocation à rassembler l'ensemble des acteurs de la région qui ont une compétence dans le domaine sanitaire, et à faire émerger des synergies et une réelle organisation sanitaire collective dans toutes les filières des secteurs animal et végétal. Si la mission première de ces associations est de fédérer et de coordonner les actions, notamment à travers l'élaboration d'un schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires, elle peut également développer les mêmes compétences que les organismes à vocation sanitaire et se voir confier des missions opérationnelles.
    L'article L. 201-12 prévoit les missions de l'association sanitaire régionale. Celle-ci collecte des informations sur les dangers sanitaires, et prépare et soumet à l'approbation de l'autorité administrative un schéma régional de maîtrise des dangers sanitaires, dont elle coordonne la mise en œuvre.
    Ce schéma permettra à l'Etat de s'assurer que toutes les filières sont bien couvertes sur tout le territoire national. Dans un souci de pragmatisme afin de tenir compte de la diversité des situations et des équilibres trouvés entre organisations professionnelles, il n'existera pas un schéma unique pour tout le territoire national mais potentiellement autant de schémas d'organisation que de régions. Ce schéma est élaboré dans le respect des règles fixées par l'Etat relatives à la prévention, la surveillance et la lutte contre les dangers sanitaires.
    Par ailleurs, cet article prévoit la possibilité pour l'association sanitaire régionale de faire approuver des programmes collectifs volontaires de prévention, de surveillance et de lutte contre certains dangers sanitaires par l'autorité administrative, dont le respect sera une condition à la mise en place d'un système de qualification sanitaire ou de certification sanitaire pour les échanges ou l'exportation.
    L'article L. 201-13 prévoit la possibilité de déléguer certaines tâches particulières liées aux contrôles à des organismes à vocation sanitaire, des organismes vétérinaires à vocation technique ou à d'autres organismes présentant des garanties de compétence, d'indépendance et d'impartialité dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Ces dispositions permettront de clarifier le cadre juridique des délégations existantes.
    L'article 2 de l'ordonnance a pour objet de mettre en cohérence les dispositions contenues dans le titre II du livre II du code rural et de la pêche maritime avec les dispositions précédentes. Ainsi, lorsqu'il est fait référence aux « maladies réputées contagieuses » dans les articles L. 221-1 à L. 228-1, celles-ci sont remplacées par les dangers sanitaires de première catégorie ou par les dangers sanitaires de deuxième catégorie faisant l'objet de mesures réglementaires par l'autorité administrative.
    De même, la nouvelle rédaction des articles L. 223-4, L. 223-5, L. 223-6, L. 228-1 et L. 228-2, l'insertion d'un article L. 223-6-1 et l'abrogation des articles L. 223-2 à L. 223-3, L. 224-1 à L. 224-3 et L. 225-1 permettent d'adapter en les simplifiant les dispositions qui s'appliquent en matière de mesures de déclaration, de prévention, de surveillance ou de lutte contre les maladies des animaux aux nouvelles catégories de dangers sanitaires.
    L'article 3 de l'ordonnance complète les dispositions prises pour la mise en œuvre du 2° du I de l'article 11 de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, qui a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance, avant le 27 juillet 2011, les dispositions législatives nécessaires afin de « 2° Modifier les dispositions des articles L. 243-1 à L. 243-3 du même code relatives aux conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par des personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire et, si nécessaire, la liste de ces actes ; ».
    L'ordonnance n° 2011-78 du 20 janvier 2011 relative aux conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par des personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire a permis de procéder à une première modification des articles cités. L'objet de l'article 3 de l'ordonnance est de modifier l'article L. 243-3 afin de permettre aux techniciens des filières avicoles et porcines de procéder à des examens lésionnels sur les cadavres des animaux de ces espèces, de permettre aux ostéopathes et aux dentistes équins de pratiquer des actes sous réserve de certaines conditions, notamment de qualifications, qui seront fixées par décret et, enfin, de permettre aux vétérinaires du service de santé des armées d'exercer la médecine et la chirurgie des animaux sans obligation d'être inscrits à l'ordre des vétérinaires.
    L'article 4 de l'ordonnance a pour objet, comme l'article 2 en matière de lutte contre les maladies des animaux, de mettre en cohérence les dispositions relatives à la santé des végétaux contenues dans le titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime. Ainsi, les organismes nuisibles définis dans l'actuel article L. 251-3 pour lesquels le ministre fixe ou peut fixer les conditions de la lutte sont définis comme des dangers de première catégorie ou des dangers sanitaires de deuxième catégorie.
    Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

Extrait du Journal officiel électronique authentifié PDF - 228,1 Ko
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