Décret n° 2008-371 du 18 avril 2008 relatif à la coordination de la lutte contre les fraudes et créant une délégation nationale à la lutte contre la fraude

Dernière mise à jour des données de ce texte : 18 juillet 2020

NOR : BCFX0807962D

JORF n°0093 du 19 avril 2008

Version en vigueur au 20 avril 2008


Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre, du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité et du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique,
Vu le code des douanes ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Vu le décret n° 96-691 du 6 août 1996 portant création d'un Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre ;
Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, modifié par le décret n° 2005-1621 du 22 décembre 2005 ;
Vu le décret n° 2005-455 du 12 mai 2005 portant création d'un Office central de lutte contre le travail illégal ;
Vu le décret n° 2006-1033 du 22 août 2006 relatif à la création de la direction générale du travail au ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement ;
Vu l'avis du conseil de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 26 mars 2008 ;
Vu l'avis du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales en date du 8 avril 2008 ;
Vu l'avis du conseil d'administration de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés en date du 2 avril 2008 ;
Vu l'avis du conseil d'administration du régime social des indépendants en date du 15 avril 2008 ;
Vu l'avis du conseil d'administration de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole en date du 26 mars 2008 ;
Vu l'avis du conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale en date du 11 avril 2008 ;
Vu la lettre de saisine du conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie en date du 21 mars 2008 ;
Vu l'avis du comité technique paritaire central de l'administration centrale du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique en date du 31 mars 2008 ;
Vu l'avis du comité technique paritaire central du ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité compétent à l'égard des services du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 4 avril 2008 ;
Le conseil des ministres entendu,
Décrète :


    • La délégation nationale à la lutte contre la fraude, placée par délégation du Premier ministre auprès du ministre chargé du budget, a pour missions :
      1° De veiller à l'efficacité et à la coordination des actions menées en matière de lutte contre la fraude, entre les services de l'Etat concernés, d'une part, et entre ces services et les organismes de sécurité sociale, les organismes de gestion de l'assurance chômage, l'association pour le régime de retraite complémentaire des salariés et l'association générale des institutions de retraite des cadres, d'autre part, notamment dans le cadre des conventions d'objectifs et de gestion passés entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale, les organismes de gestion de l'assurance chômage, l'association pour le régime de retraite complémentaire des salariés et l'association générale des institutions de retraite des cadres ;
      2° D'améliorer la connaissance des fraudes ayant un impact sur les finances publiques, et notamment d'améliorer l'évaluation existante, le suivi de son évolution et la typologie des fraudes ;
      3° De contribuer à garantir le recouvrement des recettes publiques et le versement des prestations sociales, notamment en favorisant le développement des échanges d'information, l'interopérabilité et l'interconnexion des fichiers dans les conditions prévues par la loi du 6 janvier 1978 susvisée ;
      4° De contribuer à la mise en œuvre d'une politique nationale de prévention et de communication ;
      5° De définir des axes d'une coopération renforcée avec les organismes et administrations étrangers ;
      6° De piloter l'activité des comités opérationnels de lutte contre le travail illégal mentionnés à l'article 8 et des comités locaux mentionnés à l'article 11 ;
      7° De proposer toute réforme permettant d'améliorer la lutte contre la fraude, en particulier pour renforcer les prérogatives des agents concernés, les outils à la disposition des services, les méthodes d'enquêtes, ainsi que l'effectivité des sanctions.
      La direction de la sécurité sociale, la direction générale du travail, la direction générale des impôts, la direction générale de la comptabilité publique, la direction générale des douanes et droits indirects, la direction générale de la forêt et des affaires rurales, la direction générale de la police nationale, la direction des libertés publiques et des affaires juridiques, la direction de la modernisation et de l'action territoriale, la direction générale de la gendarmerie nationale, la direction des Français à l'étranger et des étrangers en France, la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, la direction des affaires criminelles et des grâces, la direction générale de l'action sociale, la direction de l'immigration, l'inspection générale du travail des transports apportent leur concours, pour les actions qui les concernent, à l'exercice des missions de la délégation de lutte contre la fraude.
      La délégation réalise ses actions en concertation avec l'Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi d'étrangers sans titre, ainsi qu'avec l'Office central de lutte contre le travail illégal, pour les questions relevant de leur compétence.
      Elle établit un rapport annuel qui fait le bilan des actions réalisées et des résultats obtenus dans la lutte contre la fraude et qui donne des orientations sur la coordination en matière de lutte contre la fraude.
      Elle assure le secrétariat du Comité national de lutte contre la fraude et de la Commission nationale de lutte contre le travail illégal, mentionnés respectivement aux articles 5 et 7, devant lesquels elle rend compte régulièrement de ses travaux.


    • La délégation est dirigée par un délégué national nommé par décret en conseil des ministres, sur proposition du Premier ministre.
      Le directeur général du travail apporte son concours au délégué national pour toutes les questions relatives à la lutte contre le travail illégal.


    • La délégation nationale comprend, notamment, des fonctionnaires ou agents des ministères chargés du budget, du travail et de la sécurité sociale, ainsi que des magistrats, militaires, fonctionnaires et agents détachés ou mis à disposition par les ministères et organismes associés à la lutte contre les fraudes et le travail illégal.
      La délégation nationale est rattachée, pour sa gestion administrative et budgétaire, au ministère chargé du budget.


    • Il est institué un Comité national de lutte contre la fraude chargé d'orienter la politique du Gouvernement en matière de lutte contre les fraudes portant atteinte aux finances publiques, qu'elles se rapportent aux prélèvements obligatoires et autres recettes des collectivités publiques ou aux prestations sociales.


    • Le comité est présidé par le Premier ministre et comprend le ministre chargé du budget, qui le supplée en cas d'absence, ainsi que les ministres respectivement chargés du travail, de la sécurité sociale, de la santé, de la justice, de la défense, de l'intérieur, de l'agriculture et de l'immigration.
      Selon les affaires inscrites à l'ordre du jour, d'autres membres du Gouvernement peuvent être appelés à siéger au comité.
      Le comité comprend également les présidents des organismes de sécurité sociale, des organismes de gestion de l'assurance chômage, de l'association pour le régime de retraite complémentaire des salariés et de l'association générale des institutions de retraite des cadres, ou leur représentant.
      Des représentants des assemblées parlementaires sont invités à participer à ses travaux.
      Le comité peut entendre, en tant que de besoin, des représentants des collectivités territoriales ainsi que des représentants des organisations professionnelles nationales d'employeurs et de salariés, des organismes consulaires nationaux et toute personne qualifiée, ainsi que les directions mentionnées à l'article 2.


    • Lorsqu'il se réunit pour examiner les questions relatives à la lutte contre le travail illégal, le Comité national de lutte contre la fraude est dénommé Commission nationale de lutte contre le travail illégal et est présidé, en cas d'absence du Premier ministre, par le ministre chargé du travail.
      La commission est chargée, sur le rapport du délégué national à la lutte contre la fraude ou sur la proposition de son président, de :
      1° Déterminer les orientations de contrôle et de prévention relatives à la lutte contre le travail illégal et s'assurer de leur mise en œuvre coordonnée ;
      2° Définir les actions incombant prioritairement aux comités opérationnels de lutte contre le travail illégal mentionnés à l'article 8 ainsi qu'aux services de contrôle ;
      3° Veiller à la mobilisation des administrations et organismes chargés de la lutte contre le travail illégal et s'assurer de leur coordination.
      En outre, elle peut confier à la délégation nationale instituée à l'article 1er la coordination d'études réalisées par les services ou organismes mentionnés à l'article 2.


    • Il est créé, à titre expérimental et pour une durée de dix-huit mois à compter de la date de publication du présent décret, dans les départements ou régions, un comité local de lutte contre la fraude ou un comité local unique de lutte contre la fraude, présidé par le préfet et composé de représentants d'organismes locaux de protection sociale et de représentants de services de l'Etat. L'expérimentation est conduite par les préfets des départements ou régions.
      Un arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale fixe la liste des régions et des départements relevant de chacun des deux types d'expérimentation.
      Dans les régions ou départements expérimentateurs du comité local de lutte contre la fraude, le comité local définit, dans le respect des dispositions de l'article 33 du décret du 29 avril 2004 susvisé, les procédures et actions prioritaires à mettre en place pour améliorer la coordination de la lutte contre les fraudes autres que le travail illégal. En particulier, le comité veille aux échanges d'informations entre organismes de protection sociale, d'une part, et entre ces organismes et les services de l'Etat concernés, d'autre part ; il s'assure de la conduite d'actions judiciaires communes et coordonnées. Dans ces régions ou départements, le comité opérationnel de lutte contre le travail illégal conserve toutes ses fonctions.
      Dans les départements expérimentateurs du comité local unique de lutte contre la fraude, le comité opérationnel de lutte contre le travail illégal visé à l'article 9 cesse ses fonctions. Le comité local unique se réunit en formation restreinte sous la présidence du procureur de la République près le tribunal de grande instance du chef-lieu du département, chaque fois qu'une action de contrôle ou une opération concertée entre plusieurs organismes ou services est nécessaire.
      Chaque comité présente à la délégation nationale à la lutte contre la fraude un bilan trimestriel de ses actions de coordination.
      L'arrêté mentionné au premier alinéa fixe la liste des organismes et services de l'Etat membres des comités, ainsi que leurs règles d'organisation et de fonctionnement.
      Ces expérimentations font l'objet d'une évaluation présentée au Comité national de lutte contre la fraude.

    • Dans chaque département, un comité opérationnel de lutte contre le travail illégal coordonne, dans son domaine d'activité, les opérations de contrôle nécessaires, de même que toutes opérations concertées entre plusieurs administrations ou organismes.
      Le comité recense et mobilise les moyens nécessaires à l'ensemble de ces actions. Il programme ses opérations et en définit les modalités.
      Il s'assure que les administrations et organismes compétents disposent des informations nécessaires à la mise en recouvrement des cotisations sociales et impositions éludées et à la mise en œuvre des dispositions des articles L. 324-13-1, L. 324-14 et L. 324-14-2 du code du travail relatives à la responsabilité solidaire des cocontractants, donneurs d'ouvrages et maîtres d'ouvrage.


    • Le comité opérationnel est présidé par le procureur de la République près le tribunal de grande instance du chef-lieu du département. Outre un représentant du préfet et les autres procureurs de la République compétents, il réunit les agents, fonctionnaires ou militaires dont les compétences sont requises pour l'examen des questions ou le suivi des procédures dont il se saisit.
      Il est convoqué par le procureur de la République chaque fois que la mise en œuvre d'une action concertée l'exige et, au moins, tous les deux mois.
      Il est saisi par le délégué national à la lutte contre la fraude, par le préfet, par les agents de contrôle ou leurs chefs de service de toute situation susceptible de justifier l'organisation d'une action coordonnée.

    • Le comité opérationnel dispose d'un secrétariat permanent, assuré par un agent compétent en matière de lutte contre le travail illégal, conjointement désigné par le préfet et le procureur de la République.
      Le secrétaire permanent prépare les réunions du comité et apporte son concours technique à l'organisation des opérations de contrôle.
      Il tient les services de contrôle informés du suivi judiciaire des procédures.
      Il assure le traitement statistique des procès-verbaux d'enquête relatifs aux infractions de travail illégal telles que définies à l'article 1er, dont copie lui est transmise par les services de constatation du département.
      Il s'assure, dans le cadre des dispositions de l'article L. 324-13 du code du travail, de la transmission entre les services de contrôle et de recouvrement des informations et documents nécessaires à l'accomplissement de leurs missions.


    • Le Premier ministre, le ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, le ministre des affaires étrangères et européennes, la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, la garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de l'agriculture et de la pêche, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, le ministre de la défense, la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative et le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l'application du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 18 avril 2008.


Nicolas Sarkozy


Par le Président de la République :


Le Premier ministre,
François Fillon
Le ministre du budget, des comptes publics
et de la fonction publique,
Eric Woerth
Le ministre d'Etat, ministre de l'écologie,
de l'énergie, du développement durable
et de l'aménagement du territoire,
Jean-Louis Borloo
La ministre de l'intérieur,
de l'outre-mer et des collectivités territoriales,
Michèle Alliot-Marie
Le ministre des affaires étrangères
et européennes,
Bernard Kouchner
La ministre de l'économie,
de l'industrie et de l'emploi,
Christine Lagarde
Le ministre de l'immigration,
de l'intégration, de l'identité nationale
et du développement solidaire,
Brice Hortefeux
La garde des sceaux, ministre de la justice,
Rachida Dati
Le ministre de l'agriculture et de la pêche,
Michel Barnier
Le ministre du travail, des relations sociales,
de la famille et de la solidarité,
Xavier Bertrand
Le ministre de la défense,
Hervé Morin
La ministre de la santé,
de la jeunesse, des sports
et de la vie associative,
Roselyne Bachelot-Narquin

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